Histoire de Porcia
Ce bas-relief en marbre de 1495, oeuvre de
Gianmaria Mosca detto el Padovano, est exposé à la Ca d'Oro de Venise. Pour en savoir plus sur la ville de Venise.
Histoire de Porcia
La vie de Porcia, ou Portia Catonis en latin, et Porcie en français, nous est connue par des écrits d’historiens romains, tels Valère Maxime (Ier siècle ap. J.C) dans ses Actions et Paroles Mémorables, Plutarque (46 – 120 ap.J.C.) dans la Vie de Brutus et Dion Cassius (153 – 235 ap.J.C.) dans son Histoire Romaine.
William Shakespeare (1564 – 1616) place un épisode de la vie de Porcia dans sa tragédie Jules César. Pour la France, citons Guyon Guerin de Bouscal (1617 – 1676) avec sa pièce La Mort de Brute et Porcie ainsi que Claude Boyer (1618 – 1696) dans sa Porcie Romaine.
Porcia, née vers 76 av.J.C. est la fille de Marcus Portius Cato, dit Caton d’Utique (95 – 35 av.J.C.), homme politique stoïcien et de sa première femme Atilia dont il divorcera. Toute jeune Porcia fut ainsi élevée, avec succès, dans la doctrine stoïcienne pour qui le bonheur ne peut être atteint que par la Vertu.
Vers 53 av.J.C. Porcia épousa Marcus Calpurnius Bibulus, homme politique allié de son père, beaucoup plus âgé qu’elle puisqu’il avait déjà trois grands fils d’un précédent mariage. Ayant donné à son mari un fils qui mourut jeune, un ami de son père Quintus Hortensius Hortalus (114 – 50 av.J.C.) richissime avocat et orateur lui demanda de divorcer et de l’épouser le temps de lui donner des enfants et elle pourrait ensuite retourner vers son mari. Porcia indignée et amoureuse de son mari refusa cette proposition. Ce fut alors Caton, son père, qui divorça de sa femme Marcia pour la confier dans ce but à son ami Hortalus. Celle-ci lui revint à la mort d’Hortalus, rendant Caton par la même occasion très riche, ce qui lui fut toujours reproché par l’opinion publique.
En 49 av.J.C. Caton et Bibulus prirent le parti de Pompée contre César durant cette guerre civile romaine. Bibulus commandait la flotte pompéienne chargée de surveiller la côte de l’Epire – côte occidentale de la Grèce – mais ne put empêcher le débarquement des légions de Jules César et mourut d’épuisement dans les jours qui suivirent.
Caton, battu en 46 av.J.C. à la bataille de Thapus, se réfugia à Utique près de Carthage où, retiré dans sa chambre, il se perça de son épée.
Porcia, devenue veuve et orpheline, épousa alors Marcus Junius Brutus son cousin qui, pour ce faire, divorça de sa femme Pulchra pourtant admirée de tout Rome pour ses vertus. Farouchement Républicain, Brutus s’opposait par tous ses moyens au dessein hégémonique de César surtout pendant leur Consulat commun, mais cachait soigneusement à son épouse son projet d’assassiner César qu’il considérait comme un dictateur. Se doutant de quelque chose et, devant ce manque de confiance, Porcia, pour prouver son courage, s’enfonça profondément un poignard dans la cuisse. Devant cette preuve de fermeté il ne lui cacha plus aucune de ses intentions.
Après l’assassinat de César le 14 mars av.J.C. Brutus dut fuir Rome pour se réfugier en Grèce. Battu à la bataille de Philippes en 42 av.J.C. par les légions d’Octave – futur empereur Auguste - et de Marc Antoine – futur amant de Cléopâtre – Brutus préféra le suicide à la honte de se faire capturer et de participer ainsi en prisonnier au Triomphe du vainqueur. Cependant les historiens modernes pensent que ce suicide fut plutôt réalisé par une intoxication au monoxyde de carbone dans une pièce soigneusement close. |
Cette détermination et cette mort si douloureuse suscitèrent l’admiration de tous, et le suicide de Porcia fut placé au-dessus de celui de Lucrèce ou celui de Calpurnia.
L’oeuvre
Il s’agit d’un bas-relief de marbre veiné réalisé pendant la période vénitienne de l’artiste. Comme souvent Gianmaria Mosca privilégie l’expressivité des visages et des corps à la complexité d’une narration. Il prend cependant soin dans une phrase en latin, compris par l’élite qui lui achète ses œuvres, de situer et le personnage et l’action ce qui donne en traduction libre « je suis Porcia, épouse de Brutus, fille de Caton et me suis sacrifiée en prenant dans les flammes du charbon ardent ».
Porcia, vêtue d’une tunique qui dénude un corps épanoui de femme, s’appuie d’une main à la branche d’un arbre, sur le tronc où elle est assise, alors que le suicide s’est passé dans une pièce. De l’autre main, elle saisit entre deux doigts un morceau de charbon de bois retiré des flammes du brasero. Les yeux révulsés par la souffrance, mais le visage ferme, elle lève la tête vers le ciel témoignant de son désir d’y rejoindre son mari et son père.
En savoir plus sur l'artiste
Gianmaria Mosca, naît vers 1495 à Padoue. En 1507 il entre comme apprenti dans l’atelier des sculpteurs Giovanni et Antonio Minello puis celui de l’orfèvre Giacomo Mantello.
En 1520 il s’installe à Venise et travaille essentiellement pour les églises de cette ville et de celles de Padoue. En 1529 son travail étant reconnu et apprécié, il est appelé à Cracovie par le roi Sigismond Jagellon. Bien qu’arrivé trop tard pour participer à la décoration de la chapelle royale il restera 40 ans en Pologne et y recevra son surnom « le Padouan ». Il crée rapidement un atelier employant de nombreux artistes tant italiens que polonais. Devant l’abondance des commandes venues aussi bien de la famille royale, de l’aristocratie locale que des églises, s’étant spécialisé dans les monuments funéraires, il agira avec les années plus en chef d’entreprise qu’en artiste.